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Le château de Burg-Reuland, une gloire discrète

28Avr, 16 | histoire, lieux

Aux confins de deux cultures, Burg-Reuland a longtemps joué un rôle trop souvent méconnu. Et la légende voulant que les clefs du château – dont les ruines dominent la vallée de l’Ulf – ouvraient jadis les portes de Luxembourg, n’est pas dénuée de fondements historiques.

Les ruines du château s’inscrivent au coeur du village de Burg-Reuland

À quelques kilomètres de Sankt-Vith et un jet de pierre de la frontière allemande, Burg-Reuland abrite sa coquette quiétude à l’ombre de la tour de l’église saint Stéphane et, surtout, des ruines de son château féodal.

Celles-ci s’inscrivent dans un quadrilatère de quelque 65 x 55 mètres de côtés, dont le centre est occupé par le puits, redécouvert en 1991. Un pavillon d’accueil et quelques discrets aménagements prennent place là où s’érigeaient jadis les bâtiments seigneuriaux, sur la pelouse cernée de murailles.

Objets de plusieurs restaurations depuis le début du XXème siècle, chemins de rondes, souterrain et autre donjon appellent à une plongée dans le temps, dans le cadre d’une vallée remarquablement préservée.
Pas de tapage, ici. Et c’est à pied, de préférence, que l’on escaladera l’escarpement rocheux qui mène au château : les emplacements de stationnement n’y sont pas légion, et le prestige de son histoire vaut bien quelque pédestre déférence. Car le burg de Reuland, qui est loin d’avoir livré tous ses secrets, n’est jamais que la partie visible d’un passé prestigieux.

 

SOUS LES AUSPICES DU SAINT-EMPIRE

 

 

Le site est en effet occupé, et fortifié, depuis des temps immémoriaux. Ainsi les fondations de la petite tour Nord datent-elles de l’occupation romaine. Les Francs – dont les rois, pour mémoire, n’avaient pas de résidence fixe – en font une villa royale, dans laquelle Charlemagne lui-même séjourne un temps.

Mais les principaux travaux de fortification sont réalisés au Xème siècle, consécutivement aux raids normand (882) et hongrois (961). Le donjon (Bergfried) Ouest, d’où l’on découvre les environs, date de cette époque.

À l’abri de ses puissantes murailles, doublées d’un système défensif d’enceintes et de douves s’étendant jusqu’à la vallée, le burg Reuland va connaître une longue période de tranquillité durant laquelle les comtes de Reuland, aussi redoutés que familiers de la suite du Saint-Empire Romain Germanique, en profitent pour se couvrir de gloire : Werner de Reuland (fin du XIIème siècle) est un intime de Fréderic Barbarousse, tandis que Dietrich, dit « Le Lion » trouve la mort lors de la prise d’ Akkon (IIIème croisade) en menant un assaut décisif.

En 1309, toutefois, Arnold de Reuland meurt sans descendance. Les comtes de Blankenheim héritent du château et de la seigneurie, qu’ils s’empressent de revendre à Jean l‘Aveugle, comte de Luxembourg et roi de Bohème.

Celui-ci intègre la forteresse – qu’il confie à Konrad de Schleiden – dans son système de défenses orientales, avant de mourir à la célèbre bataille de Crécy (1346) tombeau de la Chevalerie. Son fils, Wenzel I, lui succède avant de trépasser sans autre gloire que son effroyable cruauté. Wenzel II, par contre, renoue avec la tradition du lieu : seigneur de Reuland, comte de Luxembourg, roi de Bohème et empereur d‘Allemagne, c’est à Reuland qu’il reçoit l’ Hommage de ses vassaux, en 1384. Il confie Reuland à Edmond von Engelsdorf, qu’il institue par ailleurs grand argentier du duché de Luxembourg et du comté de Chiny. Une charge qui restera confiée aux seigneurs de Reuland jusqu’à la fin de l’ancien régime.

 

 

En 1410, Werner von Pallant se marie avec Alverade, nièce d‘Emond. Reuland passe ainsi aux mains de cette célèbre lignée d’Empire qui va régner durant quelque deux cents ans sur les lieux. Le dernier des Pallant, Balthasar, également châtelain et seigneur à Alpen (Basse-Rhénanie), meurt en 1623. Son épouse, Elisabeth von Mylendonk, châtelaine du Drachenfels et souveraine de Meidrich (Basse-Rhénanie) l’avait précédé en 1614. Leur gisant de marbre noir est encore visible dans l‘église de Reuland.

Le comte Ferdinand von Berghes, époux de la nièce de Balthasar von Pallant, fut le dernier héritier de Reuland. Car, en 1689, le roi de France Louis XIV envahit nos régions, alors espagnoles. Comme à son habitude, ce grand frileux fait incendier le château. De 1714 à 1797, ce sont les Autrichiens qui occupent les lieux, dont la vocation militaire fait désormais partie du passé. Puis Reuland retourne à Luxembourg qui instaure un gérant, dont le dernier fut Johann Georg Franziskus Wolf.

La Révolution française sonne ensuite le glas de l’ancien régime, et le château ruiné est vendu en 1804 pour démolition. La famille Mayeres, de Reuland, acquiert les ruines et les propriétés conjointes en 1830.

Classées en 1980, elles sont désormais propriété de l‘État belge. Celui-ci y a autorisé et/ou patronné plusieurs campagnes de fouilles, dont une nouvelle devrait avoir lieu en 2007.

 

PASSEZ LA PORTE

 

 

Désormais sauvé de l’oubli, le château de Reuland peut couler des jours heureux, à l’abri des afflux touristiques connus ailleurs, en laissant ses murailles tutoyer le ciel d’octobre et le vent des légendes.

Lui rendre visite, c’est également avoir envie de mieux connaître un environnement splendide dont il constitue l’un des portiques : la vallée de l’Our.

Écrit par : Patrick Germain /2007

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Note :

Source :
•    Merci au personnel du SI de Sankt-Vith.
•    « Die Burg-Reuland » (Province de Liège – Région wallonne – Deutschsprächige Gemeinschaft)
•    « Communes de Belgique – dictionnaire d’histoire et de géographie administrative » 1980 (Crédit communal de Belgique et Renaissance du Livre)

… et en prenant un peu de hauteur avec AéroPixel

 

Où est Burg-Reuland

Burg-Reuland

Burg-Reuland_45Le château de Reuland

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