Sedan, la forteresse qui ne tomba jamais!
Aux marches occidentales de l’Ardenne, le château-fort de Sedan constitue la plus vaste fortification d’Europe. Ses quelque 35.000 mètres carrés, dominant l’ancienne cité drapière, proposent une intéressante immersion dans 600 ans d’histoire ardennaise.
Si le site est peuplé depuis le paléolithique et que l’on trouve une première mention de Sedan dans un acte de l’Empereur Germanique Othon III,il faudra néanmoins attendre le XVième siècle, avec la pose de la première pierre de ce qui allait devenir la plus vaste forteresse d’Europe, pour que la ville sorte de l’ombre.
C’est au début de ce siècle, en effet, qu’Evrard III de la Marck acquiert le prieuré Saint-Martin, dont l’origine remonterait à la fin de l’époque mérovingienne. Il l’intègre à un ensemble triangulaire, dont les extrémités sont formées par les tours jumelles, dites «de l’Est» et «petite tour».
L’ÈRE DE LA MARCK
En 1455 Jean de la Marck poursuit l’oeuvre : il double les courtines, fait procéder au chemisage de la Tour de l’Ouest, crée le pavillon ogival, la Tour d’artillerie et une nouvelle basse-cour de 10.000 m² entourée d’une épaisse muraille. C’est à lui que l’on doit également la construction d’un nouveau châtelet formé d’une tour ronde et d’une demi-tour circulaire.
Dès le début du XVIième siècle, et pour faire face au développement d’une artillerie sans cesse plus déterminante lors des sièges, Robert II de la Marck engage une nouvelle campagne de travaux. Ceux-ci concernent essentiellement le rempart, le terrassement et le renforcement des murailles. La construction du boulevard circulaire et de terrasses à canons augmentent l’épaisseur des courtines de 4,50 m à 26 m, atteignant même 50 mètres dans l’axe de la tour Nord.
Notons que parallèlement, et bien qu’antérieure, la souveraineté du Prince de Sedan n’est admise qu’au milieu de ce même XVIème siècle. Elle est obtenue officieusement, mais la Principauté s’affranchit à mesure de l’accroissement du pouvoir de son souverain et allié naturel,le Roi de France,échappant dès lors à la tutelle du Saint-Empire.
Entreprise sous Robert IV de la Marck et achevée sous Henri Robert de la Marck, la construction de quatre bastions polygonaux (du Gouverneur, Fourchue, des Dames, et du Roy) va faire de Sedan une redoutable forteresse. En 1485, le siège qu’y entament sans succès les armées de l’Archiduc Maximilien évite une invasion de la France par celui-ci.
DE TURENNE À NAPOLEON III
Un siècle plus tard, la dernière descendante des de la Marck meurt, très jeune. Elle laisse le château à son époux, Henri de la Tour d’Auvergne, Prince Sedan et Duc de Bouillon. Lequel épousera Elisabeth de Nassau en secondes noces. C’est de cette union que naît Turenne, l’un des plus prestigieux Maréchaux de France, dont les restes reposent aux Invalides.
En 1642, Frédéric Maurice de la Tour d’Auvergne donne le château et la Principauté de Sedan à Louis XIII, pour sauver sa tête suite au complot de Cinq Mars dirigé contre Richelieu. Le Maréchal Fabert, à qui la ville doit l’essor de son industrie drapière, devient alors le premier gouverneur de Sedan.
La forteresse restera domaine militaire pendant plus de 3 siècles, durant lesquels quelques aménagements complémentaires seront apportés. Vauban, entre autres, y fera construire la Porte des Princes, adaptée aux progrès de l’artillerie.
En 1822, l’église Saint-Martin est démolie pour installer un parc à boulets. Et c’est à Sedan que Napoléon III, en 1870, est encerclé puis vaincu par les troupes prussiennes, scellant la fin du Second Empire. Ultime fierté pour la garnison : la place forte, fidèle à sa tradition, n’est pas tombée.
AU PRÉSENT
En 1962 La Ville de Sedan rachète le château pour le franc symbolique. Il est classé monument historique en 1964 et, fin 2002, des travaux sont entrepris sur une portion du site pour y insérer harmonieusement un hôtel trois étoiles.
Agrémentée par un musée et plusieurs scènes de la vie de ses occupants adroitement représentées, la visite du château de Sedan constitue un parcours historique et architectural d’autant plus intéressant qu’il est commenté par des baladeurs individuels et par de nombreux panonceaux didactiques.
On y découvre également un jardin de « simples », plantes médicinales ou aromatiques de jadis, bien étoffé.
Comptez deux bonnes heures pour parcourir les quelque 35.000m² sur 7 niveaux (3 supérieurs et 4 souterrains) d’une plongée à travers les strates du passé de cette composante essentielle du patrimoine de ardennais.
Car, entre autres et pour la petite histoire, c’est à Sedan que naquirent Guillaume et Everard de la Marck, figures fascinantes de l’histoire de la Principauté de Liège, avec laquelle leur famille entretiendra longtemps des relations aléatoires. Fils de Jean, sire d’Arenberg et de Sedan, et d’Anne de Virnenbourg, les historiens divergent quant à savoir lequel des deux fût surnommé «le sanglier des Ardennes», même si Guillaume a la cote.
Écrit par : Patrick Germain /2007
Galerie
Où est Sedan
Sedan
Sedan , le château-fort
Vidéo